Père Pierre-Marie SOUBEYRAND ⋅ Quel projet d’évangélisation pour l’Église en monde musulman ?

Forum du 12 septembre 2020 - ORLÉANS

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L'intervenant

Père Pierre-Marie SOUBEYRAND

Prêtre depuis 38 ans, d’abord comme Père Blanc, puis 10 ans en Algérie, le père SOUBEYRAND est depuis 30 ans dans la communauté des Béatitudes et assure un ministère de prédication et de formation d’évangélisateurs dans différents pays. Il est l’auteur de plusieurs livres sur l’Islam: « L’Islam en question »(2011), « Comprendre l’Islam; risque ou défi? », un livre témoignage « Au risque de l’Esprit », et bien d’autres comme « L’accueil de l’Esprit ».

Toutes ses interventions

Introduction

(00:04) : Il n’y a pas de projet élaboré sinon un effort de dialogue interreligieux sans résultat marquant
depuis 50 ans. Il y a des travaux collectifs, des contributions universitaires, des prises de position à
des moments historiques, qui ouvrent des perspectives mais qui ne soucient pas outre mesure
l’institution ecclésiale.

(06:00) Il est intéressant de balayer les 15 siècles de relations avec le monde musulman et les tentatives
pour apporter l’Annonce. On pensait le monde musulman infranchissable. Ce n’est pas si vrai.

(07:30) : la première rencontre est celle de Homs en 644 entre le patriarche jacobite chaldéen Jean
1er et l’émir Sa’îd ibn ‘Amir, gouverneur militaire, qui a porté uniquement sur l’interprétation de la Loi
mahgrâ, mais ce n’est pas encore une doctrine élaborée car l’Islam, la soumission, n’existe pas
encore. L’Islam plonge ses racines dans des courants judéo chrétiens du 1 er siècle comme le
judéonazarisme, condamné par Saint Irénée. En Occident, l’Eglise romaine fait face aux envahisseurs
en Afrique du Nord, en Espagne avec beaucoup de victimes chrétiennes. En Orient, saint Jean de
Damas vit sous et au service du califat des Omeyades, avant de devenir moine et prêtre. Il est un des
premiers à qualifier l’Islam d’hérétique.

(13:00) : un autre dialogue est celui de 1391 entre l’empereur Manuel II Paléologue de Byzance et un
persan cultivé (rencontre rappelée par Benoit XVI à Ratisbonne ; il ne s’agit pas d’envisager une
approche du monde musulman mais de dénoncer l’opposition entre Foi et Raison, Religion et
Violence). Benoit XVI a voulu par cet exemple historique stigmatiser l’attitude occidentale de
considérer la raison sans Dieu et celle de l’islam qui exclut la raison du champ de la foi.

(16:00) : Fin 11 ème siècle, début 12 ème siècle le bienheureux Pierre le Vénérable, inquiet du prosélytisme
musulman, recourt à la controverse et au débat, plutôt qu’à l’invective. Fin 13 ème , début 14 ème , le
bienheureux Raymond Lulle est le premier à envisager l’évangélisation des juifs et des musulmans en
allant sur le terrain. Il pratique la langue arabe et se penche sur la culture musulmane.

(18:00) : Saint François d’Assise envisage dès sa première règle de lancer ses frères dans la mission
vers les musulmans mais ceci n’apparait plus dans la deuxième règle et ce projet très marginal,
n’influencera pas la vision de l’Eglise. Sa rencontre, idéalisée à notre époque, en 1219 à Damiette
avec le sultan d’Egypte, Malik al- Kamil, manifeste surtout la force intérieure de la vérité évangélique,
même si elle ne marquera pas la relation musulmane/chrétienne.

(21:00) Avec Saint Vincent de Paul, ce n’est plus une approche intellectuelle ou l’approche essentielle
de Saint François d’Assise mais la réaction face à l’insécurité due aux incursions de l’Empire Ottoman
à partir de l’Afrique du Nord vers les rivages du nord de la Méditerranée. Cette protection a
commencé dès le 12 ème siècle avec Saint Jean de Matha, fondateur des Pères trinitaires, et d’autres
encore aux XVIII et XIXèmes siècles qui tenteront d’apporter des secours spirituels et humains aux
esclaves chrétiens raflés en Méditerranée. Au XXème siècle un autre père trinitaire, le Père
Regimbald a voulu relancer son ordre contre deux formes d’esclavage moderne, celui des pays
communistes dans les goulags et celui des populations africaines rendues esclaves y compris en Lybie
sans que l’ONU ou l’Eglise ne protestent, malgré des rapports publics. On peut citer aussi un
témoignage récent d’un jeune père trinitaire lors de la Nuit des témoins, organisée par l’AED, où il
raconte avoir monté une expédition pour aller acheter une centaine d’enfants au Darfour, région de
Sainte Joséphine Bakhita, et les emmener au Kenya. Il existe donc des initiatives mais peut être est il
préférable de les laisser à ce niveau plutôt qu’à une campagne d’évangélisation.

(30:00) : au XIXème siècle, le cardinal Lavigerie, archevêque d’Alger et fondateur des Pères Blancs
missionnaires en Afrique, a une vision assez proche de celle du bienheureux Charles de Foucauld, à
partir des paroles du Christ sur l’envoi en mission de ses disciples. Cette œuvre n’est pas seulement
une œuvre de civilisation à intégrer dans la colonisation et à lire à la lumière de l’idéologie de notre
temps. Il s’agit de christianiser et d’assimiler ces populations à la France chrétienne, en se donnant
comme référence les communautés décrites dans les Actes des Apôtres. D’où la création de villages
chrétiens avec des enfants orphelins confiés aux pères Blancs avec un embryon de sociétés
chrétiennes autochtones. Mais cette expérience ne durera pas au-delà des années 1920/1930. On
peut citer d’autres exemples de vie cachée dans le désert comme une lampe allumée pour gagner les
cœurs au Christ.

(37:00) En amont de la déclaration Nostra Aetate de Vatican II, un nouveau regard est posé sur l’islam
dont l’un des penseurs et artisans est Louis Massignon, influencé indirectement par les Pères blancs.
« L’Eglise regarde avec estime les musulmans qui adorent le Dieu unique…comme s’est soumis à Dieu
Abraham auquel la foi islamique se réfère volontiers… ». Abraham n’est pas un adorateur d’idole
mais en se soumettant à Dieu il est devenu le premier musulman, dira l’Islam.

(40:00) : deux figures marqueront l’après concile devenues bienheureux : Monseigneur Claverie, seul
évêque resté en Algérie après l’indépendance, les autres évêques ayant peur devant l’afflux de
catéchumènes et le frère Christian de Chergé qui recherche une voie étroite de parcours avec les
musulmans au risque d’une certaine confusion par l’échange d’expériences avec les musulmans,
toujours dans un contexte de charité. Voie difficile des rencontres interreligieuses souvent ambigües
mais dont l’absence serait la renonciation à l’Annonce auprès de ceux qui souhaiteraient se tourner
vers le Christ.

(45:00) Ces 50 dernières années ont été très difficiles dans l’Eglise pour voir se dégager un projet
d’évangélisation vers le monde musulman. De fausses théories ont dévitalisé l’annonce de l’Evangile
selon lesquelles toutes les religions se valent. Le renouveau charismatique va susciter des ouvertures
surprenantes et inattendues. Le Père Soubeyrand a participé à l’accueil de musulmans qui venaient le
voir suite à des révélations personnelles de Jésus ;

(53:00)  Cette annonce ne peut se faire qu’avec des conditions préliminaires :
- Avoir fait une rencontre personnelle avec Jésus et vivre sous la conduite de l’Esprit Saint.
- Chercher à connaitre les musulmans et développer une réelle amitié pour comprendre ce
qu’est l’Islam et comment l’islam modèle leur vie.
- Avancer dans le cadre de cette amitié dans une plus grande profondeur de la vérité révélée,
en n’hésitant pas à relever les différences, en cherchant à s’appuyer sur la raison, marque de
notre ressemblance avec Dieu et en priant personnellement pour demander à Dieu de se
révéler.

En conclusion, l’œuvre de la grâce dépasse la prise de conscience de l’Eglise. Les conversions vont
provoquer a posteriori une réponse ecclésiale et pastorale qui bouleverseront l’Eglise. Il est
important de donner aux nouveaux convertis une visibilité par leur témoignage qui contribueront à
un profond renouveau de l’Eglise et à la sortir de ses peurs tétanisantes.

Événement à venir

29 mars 2025

Le samedi 29 mars 2025 de 9h00 à 19h00

Forum à BRUXELLES

La Viale Europe
Chaussée de Wavre 203
1050 IXELLES

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